ARTS ET PANDEMIE : La problématique de l’interaction entre le corps humain et son environnement au menu de l’exposition de l’artiste-plasticienne Nadia Maya Mandine.

par Ibrahima Dia
La ville de Dakar abrite depuis le 12 jusqu’au 30 avril 2023, l’exposition « Pens’Art » signée l’artiste-plasticienne Nadia Maya Mandine. C’est une série de plusieurs séries d’œuvres avec différentes techniques, qui expose la problématique de l’interaction entre le corps humain et son environnement durant la pandémie de Covid-19. Le vernissage a eu lieu vendredi 14 avril 2023 suivi d’un panel trés interessant avec un public qui a beaucoup apprécié les themes évoqués et la multitude des informations revelées par les intervenants
Les pandémies ont bouleversé, depuis fort longtemps, nos repères culturels. Face à ces crises sanitaires, les artistes sont confrontés à des situations inédites. Ils se sont remis en question et adaptés aux changements qui font maintenant partie de leur quotidien. En effet, la pandémie a changé la façon de consommer l’art, un art marqué par la période : par la crise du Covid-19. Elle a, ensuite, constitué une source d’inspiration pour l’artiste. Nadia Maya Mandine a été une de ces artistes. À travers son exposition « Pens’Art » la jeune plasticienne contribue à la guérison de l’homme et de son humanité face à cette pandémie récente et celles des décennies et siècles passés. Nadia s’y emploie en présentant des séries d’œuvres. Une sélection de créations qui invitent, comme le soutient son commissaire d’exposition, Pr Maguèye Kassé, à « des réflexions articulées à l’art pour proposer des perspectives de gestion » et le rétablissement de l’humanisme.
L’exposition, logée au dernier étage de l’Hôtel de Ville jusqu’au 30 avril, est une somme d’expériences que Nadia M. Mandine a essayé de représenter par des images qui, selon elles, « conservent surtout la mémoire ». Par-là, elle souhaite inciter à anticiper sur les questions de gestion de quelques sortes de pandémies « qui entraînent toujours de grandes crises, des bouleversements conséquents dans le quotidien et l’attitude de l’homme ». Elle cite la distanciation sociale qui a dérangé des communautés, et le confinement qui a été une réclusion et aussi un fort moment de réflexion et de production.
Les œuvres s’articulent en séries, d’A à G. La Série A, « Central », expose le corps dans sa matière interne, et son environnement qui est la matière externe. Ici, l’homme est présenté comme la malheureuse vedette qui se trouve au centre d’un monde happé par une globalisation débridée qui ébranle autant son être que son identité. Un être et une identité, d’après Pr Kassé, en proie « à des interactions non productives de sens nouveau, entraînant la perte de repère et qui mettent en évidence la fragilité du corps ». La Série B est titrée « Action/Réaction ». La fragilité de l’homme est ici plus évidente, avec sa vulnérabilité quand il réagit aux effets de la nature. Mais son action débilitante est aussi évoquée quant au rapport de destruction à son environnement. Il s’autodétruit, en réalité. On trouve dans l’œuvre « Fœtus », qui traduit l’homme en tant qu’être en devenir, vulnérable et perfectible, qui ne finit pas de se développer et de se découvrir. « Source » permet à côté d’interroger la main de l’homme dans l’origine de ses malheurs qui lui viennent des corps végétal et animal.
Dans la Série C, le déluge caresse le sacré et la spiritualité, en confrontation avec nos raisons scientifiques. Nadia Mandine soutient que les pandémies pourraient être quelquefois considérées comme une sorte de punition divine afin d’expier nos fautes. La jeune plasticienne qui insiste sur le sens de la croyance dans ces périodes troubles évoque une humanité à sauver pour perpétuer l’espèce. Ainsi voit-on dans l’œuvre « Noyade » un vieil homme perdu dans les flots et qui espère une bouée de sauvetage. Nadia sert l’image d’une sagesse qui se perd, une génération en détresse mentale, une autorité qui flanche et, partant, une mémoire et une paix menacées.
Pour rappel la table ronde était axé sur le thème «Pandémie et psychose: quelles perspectives de gestion» en présence du Professeur Magueye Kassé (Critique d’Arts), du Médecin-Colonel Amadou Cambel Dieng (Expert des Nations Unies en Gestion de Crise et Santé Publique), du Professeur Momar Codé Ba (Agrégé de Médecine), du Professeur Abdoulaye Elimane Kane (Philosophe – Écrivain), de Mme Fatimata Diallo Ba (Professeure de Lettres Classiques) et de M. Abdoulaye Diallo (Ingénieur en Télécommunications et Artiste Plasticien).