BISSORÉ GUISSE, le génie de la mécanique et de la métallurgie, Le Docteur ès Fer !
Mamadou GUISSE plus connu sous le pseudonyme de BISSORÉ ou plus affectueusement PABIS est né en 1904 à Dakar.
Fils de Seydou et de Ndoumbé DIENG, ses origines remontent à Hamady Ounaré dans le Fouta du côté de son père et de Rufisque du côté de sa mère. Il grandit au quartier de Guendel avant que sa famille n’émigre à Fass pour les besoins de construction du chemin de fer.
Il embrasse très tôt les métiers de la mécanique et de la menuiserie Métallique au détriment de l’école française. C’était aussi la volonté de son père qui l’initia très tôt auxdits métiers.
À l’âge de 5 ans, à l’époque où les enfants des Quatre Communes allèrent à l’école, Bissoré partit dans les ateliers du dépôt de Thies-Kayes où son père Seydou était chef d’atelier Forges et ajusteur principal. C’était lui qui reforgeait et réajustait les bielles motrices des locomotives à vapeur qui s’usaient à force de rouler. C’est là-bas que Bissoré apprit les métiers de la mécanique et de la métallurgie.
N’empêche, le vieux Seydou GUISSE avait aussi son garage à Rufisque et précisément à Keury-Souf à la Rue de Mbao X Ngalam. C’est dans cet atelier que Bissoré affûta ses armes.
En 1922, à l’âge de 18 ans comme tous les ressortissants français des Quatre Communes, Bissoré GUISSE intégra l’armée. Il fut incorporé au camp Archinard de Ouakam avec ses camarades tels Ama NDONGO père de feus Ablaye NDONGO qui était au Trésor et l’Adjudant Ndiassé NDONGO, le vieux Tamsir SAMB de Diokoul, père de Doudou SAMB, le vieux El Hadj SOUARE, le vieux Ousmane BEYE…etc.
Durant son service militaire, à l’issue de la revue, il fallait démonter et remonter des armes Mousquetons. Il le fit avec une aisance déconcertante
qui intrigua les Français qui, dès lors, entamèrent une enquête jusqu’aux ateliers de Seydou GUISSE à Keury-Souf. Ils furent convaincus à la suite que cette aisance était un don.
Il fut détaché de son unité au sein de l’armée et envoyé aux ateliers durant sa période légale de mobilisation.
Il revint à Rufisque et au moment de l’ouverture de Sococim qui s’appelait à l’époque Chaux et Ciment où il fut recruté. Il fut partie de l’ équipe qu’il a monté le pont de chemin de fer de Sococim qui venait directement des ateliers de Pont-à-Mousson de France.
C’est à cette époque que Jean Desplat qui était installé sur la rue Jules Ferry de Keury-Souf, face place PMI le remarqua. Jean Desplats qui avait des cars de transport en fit son chef de garage. Leur compagnonnage prit fin rapidement parce que Bissoré était sollicité par pas mal d’entreprises dont les Travaux Publics qui avaient des Chevrolet à cylindres qu’aucun mécanicien n’arrivait à assurer leur entretien convenablement. Bissoré était un des rares capables de faire des branchements en ligne sur ces moteurs et les démarrer au quart de tour.
Pendant la 2eme guerre mondiale, alors qu’il était aux Travaux Publics, il fut consigné et doit rester disponible pour l’armée pour les travaux de mécanique et autre.
Son expertise était reconnue et il avait même le don de reconnaître une panne de voiture rien qu’en entendant le bruit du moteur.
En plus de ses compétences en mécanique, il était l’un des meilleurs ferblantiers du pays, ceux qui fabriquent les abreuvoirs, les gouttières en galvanisé, les arrosoirs, les bouilloires…tout ce qui est galvanisé et qu’on soude à l’étain.
Il était aussi un chaudronnier et soudeur confirmé, horloger et armurier. Il démontait, reparaît et remontait les armes. Il était aussi l’un des rares à exceller dans les Poids et Mesures, les balances, les pompes à huiles, les pompes à eau, les pompes éoliennes…. D’ailleurs, il assistait annuellement la Commission Nationale que le Ministère du Commerce envoyait pour le réglage et le poinçonnage des appareils de mesure.
Les gens venaient de tout le pays et même au-delà pour faire réparer des appareils de mesure et surtout les pompes à huile. Il reparaît les machines à écrire, les machines à coudre, le rare à réparer les lampes Coleman et les montres, son activité dominicale.
Aussi, était-il l’un des meilleurs Tourneurs du pays. Les gens venaient de tous les horizons pour solliciter son expertise. Il ajustait et fabriquait des pièces essentielles au fonctionnement des moteurs.
Il n’avait d’égal dans son métier et certains le sollicitaient à chaque fois qu’ils étaient devant un écueil.
Il fit la majeure partie de sa carrière dans les ateliers de « Conditionnement », cette unité française chargée du traitement de l’arachide récolté car à l’époque, Rufisque était aussi un port arachidier. C’est aussi là-bas qu’il lia une relation fraternelle forte avec le vieux Mamadou SENE, plus connu sous le nom de Eumeud SENE, père de l’ancien Maire de Rufisque, le regretté Mamaya SENE qui, jusqu’à ses derniers jours, perpétua cette relation avec la famille de Bissoré GUISSE. Les relations de Bissoré et du père de Feu Mamaya SENE étaient tellement fortes que l’un ne pouvait rester une journée sans voir l’autre. Eumeud SENE mourut presque dans les bras de Bissoré, devant lui
Il « hérita » du matériel et des ateliers de « Conditionnement » au départ des Français.
Il fut décoré deux fois de La Croix d’Honneur du Travail par le Conditionnement et la Chambre des Métiers du Cap Vert
La délivrance de certificat de travail par Bissoré GUISSE avait valeur de diplôme d’expertise. Elle était très recherchée ! Il en attestait parcimonieusement parce que connaissant sa valeur.
Parmi ses apprentis qui ont passer à l’embauche avec son certificat de travail on peut citer Pape DIAGNE pour les ICS, Cire MBOW,NIANG à ICOTAF, vieux Maguette DIEYE BARKA Travaux Publics, son jeune frère Malick GUISSE au Poids et Mesures et qui s’était établi à Fatick, Doudou GUEYE GODEZILA ,Ibrahima MBENGUE, Bissoré SECK DE L’Adminitration Pénitentiaire.
C’est lui qui forma les Pierre NDOUR, Samba NDAR l’un des plus grands chefs de garage.
C’est son ami, l’ancien gouverneur Mouhamed Papa DIOUF NGALANDOU de Keury-Souf qui l’avait surnommé « Docteur ès Fer. » ils avaient une relation forte empreinte d’affection et de courtoisie.
Il avait aussi une relation privilégiée avec la communauté libanaise de Rufisque parce que tellement il leur a rendu service en leur réparant leur matériel ou leurs véhicules qu’ils n’espéraient plus voir en marche.
D’ailleurs, c’est lui qui a construit les premiers kiosques à pain de Rufisque, les portes métalliques des magasins de Rufisque, les portes métalliques à
volets roulants de Rufisque. La communauté libanaise lui témoignait une grande affection. Durant sa maladie et jusqu’à son dernier jour, chaque soir un dîner lui parvenait de cette communauté qui l’a accompagné jusqu’à sa dernière demeure. Nous nous rappelons encore leur geste fort aux obsèques de Bissoré GUISSE.
Il faut dire aussi que Bissoré GUISSE était d’une générosité débordante. Il ne demandait jamais à être payé après un travail. Il laissait à l’individu le soin d’apprécier et rémunérer selon ses moyens. Pour les tacherons qui vivaient de leur outil de travail en panne, il n’acceptait jamais d’être payé. Les démunis passaient avant sa famille. Son atelier était empli le matin de toutes ces personnes à qui il assurait la dépense quotidienne.
Bissoré GUISSE s’est éteint le 19 Mars 1989 à l’âge de 85 ans et repose à Dangou.
Au nom de sa famille, de son fidèle Ousseynou FAYE dit « Hitler »,
Son fils,
Ameth GUISSE
Directeur Général de MAACK Petroleum Company
Président de l’Association Sénégalaise des Pétroliers
Lauréat du Grand Prix Cheikh Hamidou Kane pour le roman africain
Auteur des romans « Femmes dévouées, femmes aimantes », « Une mort magnifique », « 42, rue Augustin Moreau », « La révolte des Infortunés », « Autour d’Anit