Régime de Macky Sall : quand la solution devient le problème (Par Biram Khoudia Lo)
La capacité de réaction rapide, agile et adaptée du gouvernement du Sénégal face aux aléas du monde VICA (volatil, incertain, complexe et ambigu) est extrêmement faible voire inexistante si nous considérons la situation désastreuse et déconcertante que vivent les masses populaires face à l’augmentation généralisée des prix des denrées de première nécessité.
Comment ne pas remarquer que ces conditions difficiles dans lesquelles vivent aujourd’hui les couches sociales vulnérables ne sont que les résultats d’une mauvaise administration qui ne cesse de perdurer sous le régime de Macky Sall ? Le peuple agonisant a perdu tous les droits allant de celui de mener tant soi peu une vie qui assure le bien être minimum à savoir manger à sa faim, à celui de manifester son mécontentement face au coup élevé de la vie. On prive le peuple du confort minimum et on l’empêche de s’exprimer.
Cette stratégie de neutralisation des masses populaires est le propre des dictateurs qui exercent une pression extravagante sur ces dernières afin de mieux asseoir leur régime basé sur la terreur et l’angoisse. Nos gouvernants devaient avoir une stratégie d’anticipation puisqu’ils dirigent un pays et non un coin de rue. Gouverner, c’est prévoir, donc éviter les dépenses faramineuses et non urgentes pour étudier fondamentalement les priorités afin de pouvoir abréger les souffrances des masses populaires qui vous ont confié la direction de leur pays.
Comment comprendre l’achat d’un avion présidentiel à coup de milliards en pleine crise sanitaire mondiale au moment où le peuple peine à assurer deux repas quotidiens et le monde rural réclame des semences de qualité pour tendre vers l’autosuffisance alimentaire ; au moment où la jeunesse est abandonnée à l’aventure risquée de l’immigration clandestine car elle ne constitue plus une préoccupation pour le pouvoir et son futur est livré au hasard. Les priorités sont ailleurs surtout lorsque la situation sanitaire exige les vidéo-conférences et le télé travail en lieu et place des grandes conférences nécessitant un déplacement du Président de la République. Le nouveau monde nous offre un gain de temps et d’opportunités considérables que nos dirigeants peinent à appréhender efficacement. Ils sont toujours dans les vieilles habitudes de déplacement avec un staff composé d’hommes et de femmes affamés de prestige, de privilèges et de prébendes, qui aiment le tourisme gouvernemental dont toutes les dépenses sont tirées de la poche du contribuable muselé à outrance.
Réagir efficacement, c’est ne pas perdre de temps pour supprimer toutes les institutions et directions budgétivores qui absorbent la moitié des impôts et taxes pour subventionner les produits de bases qui assurent au sénégalais moyen le minimum vital. Dans un pays ou les trois quarts des ménages dépensent quotidiennement 2500f et que 7% dépensent moins de 500f par jour, il est inconcevable d’avoir un gouvernement de trente-neuf ministres, une assemblée nationale pléthorique et un conseil économique et social qui s’est versé d’ailleurs dans un mutisme total et refuse de se pencher sur le taux de mortalité élevé des entreprises créant ainsi un manque d’emploi, mère d’une pauvreté chronique.
Un pays sérieux ne peut vivre éternellement d’aide et de taxes. L’entreprise est la cellule de base de la création de richesse et d’emploi mais nos dirigeants favorisent les firmes étrangères au détriment des nationaux qui sont asphyxiées par les impôts au point d’avoir une courte durée d’existence. Ces entreprises agricoles, de pêche, d’élevage qui devaient assurer l’autosuffisance alimentaire n’affichent aucune performance et évoluent dans l’informel avec un manque de soutien notoire de la part du gouvernement. Ainsi plus de quatre-vingts pour cent des produits alimentaires sont importés.
Alors la balance commerciale est toujours déficitaire et l’économie est extravertie. Donc, nous ressentons plus des crises provenant de l’extérieur et, étant donné que nous ne vivons que de taxes et d’impôts, la suppression de ces derniers signera la fin de règne de nos gouvernants. C’est cette vérité qu’il n’osent pas révéler. Donc nous avons un gouvernement qui n’a jamais eu de modèle économique claire. Pire, le modèle social que nous avons, basé sur la corruption, la concussion, l’achat de conscience, les commissions, les marchés et surfacturations influence le modèle économique au point de le paralyser. Pendant que notre économie est livrée à l’appétit vorace des entreprises étrangères, nos derniers publics sont détournés de leur destination normale.
Cependant, le nouveau monde nous exige de manière irréversible, un changement de paradigme ou alors une chute inévitable. Ce changement doit impérativement passer naturellement par peur, la colère, la dépression pour revenir à l’acceptation et remonter la pente ascendante : c’est le catharsis, un processus que nos gouvernants refusent catégoriquement car ils sont attachés à leur zone de confort. Or, pour être créatif, il faut accepter d’aller vers l’inconfort Les soubresauts que subissent nos gouvernements le confirment à suffisance.
Les solutions, c’est d’abord s’appuyer sur la transparence, c’est-à-dire avoir la culture de rendre compte et éviter le refus de certaines autorités de répondre à l’OFNAC. Ainsi les outils et supports de contrôle efficace doivent être installés au moment de la prise de fonction de l’autorité. La transversalité doit suivre, c’est-à-dire donner à chaque intervenant dans un processus un champ d’action limité mais visible par tous les acteurs de ce processus. Ici également, il faut des outils, leviers et supports digitaux pour le réussir. L’interdépendance pour situer les responsabilités et découvrir immédiatement les causes et l’auteur des contraintes qui bloquent le processus.
L’instantanéité qui nous édifie sur le fait que tous les acteurs du système ou du processus soient sur la même longueur d’onde, c’est-à-dire émettent sur la même fréquence pour éviter d’éventuels disfonctionnements. La collaboration qui permet de réussir à relever le défi dans une logique de complémentarité et la rapidité car les réalités peuvent changer à tout moment et on risque d’être dépassé. Tous ces paramètres nécessitent l’utilisation de supports, d’outils et de leviers pour la mise sur pied de leur applicabilité effective. Dès lors, il faut avoir à l’esprit qu’une simple description de la situation pour aller directement à la solution peut transformer cette dernière en problème.
Malheureusement, les solutions souvent préconisées par nos gouvernants ignorent les contraintes liées au contexte et à l’environnement, ce qui contribue à les transformer en problème et le cycle recommence. La plus belle preuve de cette situation, c’est la baisse du prix du loyer qui a fini par entraîner une hausse généralisée tout simplement parce qu’il y a ni suivi, ni contrôle encore moins une intégration de la dimension socio-culturelle dans leur étude.
Pour pouvoir appliquer ces solutions précitées, il faut sortir de sa zone de confort pour affronter la réalité, c’est-à-dire accepter de subir les affres de l’inconfort : diminuer ses avantages, réduire la taille du gouvernement, supprimer les dépenses de prestige, éliminer les institutions budgétivores, bref serrer la ceinture des privilégiés pour permettre aux moins favorisés d’obtenir les conditions minimales pour pouvoir être en mesure de travailler, c’est dire de créer des richesses additionnelles. Ce n’est qu’à ce prix que nos gouvernements parviendront à redresser la barre pour emprunter le chemin de la croissance.