SOCIETE : HISTOIRE MECONNUE DE EL HADJ OUARA KONE par MEISSA NDIAYE BEYE

Feu El hadji Ouara Koné est né vers 1895 en Guinée, avec comme nom, à l’état- civil : Soroma Condé.Il est le fils de Balla Condé et de Macoura Mara.
Il doit ce patronyme à son grand-père paternel,Soroma Condé,de la chefferie de Soroma’ya,en Guinée.
Après ses études coraniques réussies, Soroma Condé fût mobilisé lors de la première guerre mondiale, en 14-18, à l’âge de 19 ans. Il démontra durant ce conflit,sur tous théâtres d’opérations où il était présent,sa bravoure et son intelligence innée de chef;c’est ce qui amènera , ses supérieurs à le dénommer « Ouara « , c’est- à -dire :le lion.
Dès lors, c’est ce surnom de guerrier d’excellence qui remplacera son identité d’origine, sur tous ses papiers.
Après la Grande guerre de 14-18, il fut affecté à l’Hôpital principal de Dakar, comme infirmier africain; mais il n y resta que peu de temps car,ne se suffisant pas à des tâches subalternes, à lui confiées. Il fut donc réaffecté au Service d’hygiène à Rufisque qui devint, alors, sa ville d’adoption et son port d’attache.
Très sensible aux préoccupations des populations et outré par les nombreuses exactions permises, à l’administration coloniale, il préféra démissionner, pour devenir son propre employeur ,en s’occupant de ses propres affaires…
C’est ainsi, qu’ après s’être essayé à plusieurs métiers dont celui de transporteur, il devint commerçant.
C’est cette posture qui lui aura ouvert les portes de l’opulence tant souhaitée et lui aura ,aussi, permis de pouvoir aider, en toute discrétion, ses amis et ses connaissances.
En effet, il n’aura de cesse, alors, d’aider tous ceux qui , arrivant, inconnus ou connus, toquer à la porte de sa maison qui était toujours pleine, au grand bonheur de toute la famille.
Ses premières activités commerciales consistaient en la vente de tabac, de beurre de karité…en provenance de la République du Soudan français devenu la République sœur du Mali.
Le train du Dakar-Niger s’arrêtait alors à la gare de Rufisque et les porte-faix(« baragnini ») chargeaient,sur leur dos, les marchandises à déposer à sa maison de Guendel qu’il avait construite, sur un modèle colonial.
C’était alors un signe distinctif de richesse, à l’époque, mais il n’en avait cure, préférant de loin sa pension symbolique de militaire 14-18, pleine de souvenirs.
Malheureusement, cette majesteuse demeure au style original d’époque,a été rasée , avec le tracé du TER, à Rufisque.
Plus tard, Ouara Koné sintéressa à la vente de tissus malgré la présence et la suprématie des libano-syriens ayant pignon sur rue à Rufisque. C’est, d’ailleurs,ce qui l’a rendu très populaire puisqu’étant, le premier Noir,à s’attaquer à ce segment du marché,en pleine période coloniale.
En 1940, il fut appelé à rentrer d’urgence en Guinée. Il partit avec son fils aîné ,Isaa Koné (portant le casque colonial en miniature)accompagné par sa maman , pour se voir signifier ,qu’à l’unanimité, ses grands frères et leurs contemporains, l’avaient désigné pour diriger la chefferie, pour être chef de canton.
Il dut, à son corps défendant, refuser l’honneur qui lui était fait, laissant la place à son grand- frère, pour le droit d’aînesse, d’une part, et d’autre part,par ce que des informations lui étaient parvenues que la Ville de Dakar était assiégée et bombardée par le régime de Vichy.
C’était en septembre 1940. C’est ainsi qu’il retourna au Sénégal, privilégiant la cohésion de sa famille guinéenne et l’amour pour ce Sénégal qui l’aura accueilli.
Il tissa, alors,un réseau d’amitiés sincères, avec les notabilités politiques et coutumièresde Rufisque,parmi lesquelles,le Maire Maurice Guéye, Elhadji Demba Tend Wade ,chef de quartier de Géndel III, l’imam de la grande Mosquée de Keury-Souf, El hadji Djibril Ndiaye,
El Hadji Biram Ndoye, « Ndey-ji Réew, au quartier de Guendel II, père de l’illustre Docteur Thianar Ndoye et bien d’autres célèbres personnes de la Ville de Maam Kumba Lamb.
Birago Diop nous rappelle fort opportunément : »Quand la mémoire va à la chasse, elle rapporte le fagot qui lui plaît « .